Comme la dérive des continents, la recomposition de l’ordre mondial est un processus long et lent, quand on l’observe chaque mois. Bien que rythmé par des chocs violents (créant des chaînes de montagnes) et des détachements définitifs (créant des détroits, des mers ou des océans), la tectonique des plaques géopolitiques s’inscrit dans le temps long.
Si, entre les Etats-Unis et la Chine, deux des principales puissances dans ce nouvel ordre, certains ont déjà choisi leur camp et n’ont que peu de marge de manœuvre pour faire évoluer leur position, cela ne doit pas pour autant nous faire oublier les zones dont l’allégeance et les relations restent encore à forger. Ce sont ces régions que nous avons choisies de mettre en avant dans ce numéro.
La plus vaste d’entre elles est l’Amérique latine. Longtemps considérée comme le backyard des Etats-Unis, ayant plus récemment fait l’objet d’une stratégie d’influence active de la part de la Chine, elle est maintenant en funambule, parfois tentant de forger un destin plus autonome, à l’image du Brésil, ou bien capable de basculer d’un côté ou de l’autre. L’élection de Javier Milei, libertarien américaniste, dans une Argentine qui devait rejoindre les BRICS à la fin de l’année, est l’incarnation de ce jeu d’influence en cours et qui s’accentuera dans les années à venir. La Chine n’a pas dit son dernier mot, exerçant son influence non-seulement à travers l’attractivité des BRICS, mais aussi à travers des investissements massifs dans des infrastructures, majoritairement via les projets de Nouvelles Routes de la Soie. Les Etats-Unis, quant à eux, commencent à envisager le repli de leur influence globale sur leur aire régionale, initié par Trump, non plus comme un choix politique, mais comme une nécessité, du fait d’une capacité amoindrie de projection à travers le monde. Ces deux tendances font que l’Amérique latine devient le centre de gravité de l’affrontement économique de ces deux puissances.
Autre point mouvant de la tectonique des plaques de l’ordre mondial, le Sud-Caucase. L’explosion des tensions entre Arménie et Azerbaïdjan autour du Haut-Karabagh au mois de septembre s’est muée en déclaration conjointe pacifique au début du mois de décembre. Une négociation diplomatique qui a été conduite en bilatéral entre les deux parties du différend, sans intermédiaire. Un fort signe de progrès dans les relations diplomatiques entre ces deux pays, alors que ce conflit fait l’objet d’engagements actifs des différentes puissances régionales. Un événement qui nous conforte dans l’anticipation de la tendance des verrous à la paix à faire sauter pour laisser place à une forme de stabilisation, au prix de chocs violents, certes.
Le continent qui oriente le moins bien sa dérive reste l’Europe, comme le montre l’évaluation de nos anticipations pour l’année 2023 (avec un score de 82,43% de succès). Une Europe qui s’efface de ce nouveau monde multipolaire, sans chocs trop visibles pour l’instant, mais dont la réalité est indéniable et se fera ressentir plus tôt que tard. Alors que les Etats-Unis arrivent, eux, à maîtriser cette dérive en se raccrochant aux places fortes multipolaires, même si cela passe par des relations conflictuelles.
Nous vous livrons ici une nouvelle mise à jour de notre carte globale, pour vous recentrer avec nous en cette fin d’année, et nous vous invitons à vous projeter à nos côtés en 2024. L’année prochaine marquera le 35ème anniversaire de la chute du mur de Berlin. Nous avons donc prolongé notre regard dans le rétroviseur, de l’année 2023 à 1989, pour lister les 35 événements marquants de la transition systémique globale. Ainsi, nous vous proposons, dans un sondage, d’anticiper celui qui marquera l’année 2024. Nous partagerons nos réflexions avec vous en ligne lors qu’un événement spécial organisé le 11 janvier 2024.
Avec tous nos meilleurs vœux pour la nouvelle année qui se présente, nous vous souhaitons une belle lecture et de joyeuses fêtes.
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